WOMEN ON THE ROAD FOR AFGHANISTAN

FEMMES EN MARCHE POUR L'AFGHANISTAN

Reportage



NOTRE ENVOYEE SPECIALE AVEC LES EXILES AFGHANS DU PANSHIR / Les oubliés du bout du monde

Il aura fallu deux jours de pourparlers, d’attente et d’incertitude pour que la réponse positive à notre demande d’aller dans la vallée du Panshir nous parvienne enfin.

Après que l’on nous eut réaffirmé que le déplacement n’est pas sans risque ni sans danger, une décharge nous est demandée. Prévu à 9 h du matin, le décollage de l’hélicoptère chargé de nous transporter n’est effectif qu’aux alentours de 15 h. Il fallait, pour ce faire, une autorisation de décollage des autorités tadjikes, l’aérodrome étant fermé en prévision de la visite du Premier ministre chinois suivie du sommet des chefs d’Etat du groupe de Shanghai (Russie, Chine, Tadjikistan, Kirghizistan, Kazakhstan). Près de trois heures de vol et nous voici au centre de la vallée du Panshir. La vallée du Panshir, une zone encaissée entre deux barrières montagneuses, est une zone plane de 120 km de long, d’une largeur de 50 à 3000 mètres. L’unique route, sinueuse et accidentée, la route de Kaboul qui traverse la vallée, est parallèle à la rivière du même nom.e, des cadavres de chars, témoins de combats plus ou moins lointains. C’est dans cette vallée du nord de l’Afghanistan qu’est retranchée la résistance aux Taliban menée par le commandant Massoud. La ligne de front est à quelques dizaines de kilomètres, sur la route de Kaboul. Du village de Bazarak où nous avons été hébergés pendant notre séjour dans la vallée du Panshir, nous entendions les bombardements aériens des Taliban. Au premier soir de leur offensive (le 1er juiller) appuyés par 2500 soldats pakistanais, ils ont lancé cinq attaques simultanées dans des zones contrôlées par la résistance du commandant massoud. Une de ces attaques ciblait l’aéroport militaire de Bagram, à 30 km de Kaboul au Sud. L’attaque a échoué a-t-on indiqué de source de la résistance. Dans la vallée, nous avons vu des femmes porter, sans aucune contrainte ni obligation, le tchadri, cet ample vêtement bleu qui recouvre tout le corps des femmes de la tête aux pieds, imposé par les Taliban, d’autres femmes porter un simple foulard sur la tête. Nous avons vu des classes de filles dans les camps de réfugiés alors que les petites filles sont interdites d’éducation par les Taliban, des enseignantes. Nous avons entendu de la musique et assisté dans la rue à une fête. Il n’y avait certes que des hommes mais la fête était là. Toutes les choses interdites dans les zones dirigées par les Taliban. Musulman pratiquant, le commandant Massoud s’est toutefois engagé à ne pas contraindre les femmes à porter le tchadri, encourage l’éducation — non mixte — et le travail féminin. A Bazarak, un gros bourg animé et vivant, 13880 familles réfugiées ont été accueillies. Dans toute la vallée vivent quelque 300 000 personnes dans des conditions de précarité, de dénuement et de malnutrition avérée. En matière de couverture sanitaire, la vallée compte 10 cliniques dont trois sont gérées par l’ONG française AIM. C’est dans ces cliniques que se trouvent les équipements les plus importants. Médecins du monde soutient une autre clinique, une sixième est dirigée par l’association Solidarité et les quatre dernières par Médecins sans frontières. Il y a aussi trois hôpitaux. Les maladies les plus fréquentes sont, nous a-t-on dit, la rougeole, les infections respiratoires, la tuberculose, le tétanos, la diphtérie, la poliomyélite. Il n’y a pas de lieu spécifique pour traiter les problèmes de santé mentale. «Il y des médecins sans travail à Douchanbé, Ici dans la vallée on a besoin d’eux», avons-nous entendu de la bouche de plus d’un responsable de la résistance. Bahawdine Chanuni, resposnable des réfugiés dans le gouvernement de Rabbani et membre de la résistance, a été un des organisateurs de notre séjour dans la vallée. Il nous a reçus, accompagnés, guidés dans la visite des camps de réfugiés, des écoles et établissements sanitaires. D’autres responsables sont venus à notre rencontre : le ministre chargé de l’éducation et son épouse, le porte-parole du gouvernement, Mohamed Younès Qanoni, et d’autres encore. Tout comme le commandant Massoud, le responsable chargé des réfugiés attend des Afghans de l’extérieur de sensibiliser l’opinion internationale à la détresse de leurs compatriotes de l’intérieur, de s’unir et de s’organiser pour aider leur pays en guerre à construire des écoles, à payer les salaires des enseignants (5 dollars par mois). Une des préoccupations et des priorités de la résistance afghane est l’éducation. Les classes sont séparées, mais filles et garçons sont scolarisés sans discrimination. «Vous, vous vivez à l’ère Internet et nous n’avons même pas l’élémentaire», souligne Zahal Zara, l’épouse du ministre de l’education, responsable des femmes auprès de ce ministère. Elle s’efforce de monter des ateliers d’apprentissage pour femmes, d’alphabétisation. Son souci est de trouver de l’argent pour payer les salaires des enseignantes et des formatrices. «Ce qui m’inquiète, c’est toutes ces veuves qui sont obligées de mendier.» Elle souhaite entrer en contact avec des associations étrangères pour l’aider à réaliser ses projets. «On n’a ni radio ni téléphone, nous sommes coupés du reste du monde.» Ne pensez-vous pas qu’il faut d’abord agir pour la paix ? A cette question, elle répond sans hésitation : «S’il fallait attendre la paix, les enfants qui ont aujourd’hui 20 ans n’auraient jamais mis les pieds à l’école. La vie continue.» Le camp de Dachtak, sur l’autre rive du Panshir, est accessible par un pont de fortune construit à partir de carcasses de chars. 900 familles vivent dans ce camp à raison d’une famille par pièce construite en dur. Sous une tente de 3 m sur 2, une quarantaine d’enfants, accroupis sur des galets, la plupart pieds nus, suivent cinq heures par jour la classe. Pas de tableau, quelques crayons et cahiers pour tout outil pédagogique. Tout manque cruellement. «Ils ne prennent même pas un repas par jour.» 200 élèves sont inscrits en CP, 25 enseignants réfugiés, sans salaires depuis un an, dispensent leur savoir, sans livre, vaille que vaille. Un peu plus loin, on nous montre une école en construction à l’initiative d’une petite association d’Afghans de France. Dans une pièce, des jeunes filles suivent un cours de persan. C’est le lycée de filles. C’est la même réalité qui se présente à nous dans les deux autres camps visités, celui de Dolansang et Anabah. Les réfugiés, à l’instar des personnes momentanément déplacées que nous avons croisées sur la route, fuyant les provinces voisines de Kaboul bombardées par les Taliban, arrivent exténués, sales. Ils marchent droit devant eux, le regard hagard, ils ne savent pas où aller mais guidés par le seul désir de laisser loin derrière eux les Taliban qui avancent vers leurs villages. Plus nous nous rapprochons de la ligne de front et plus la file se fait compacte. Les noms des localités attaquées n’ont pour nous aucune consonance. Pour ceux qui les ont fuies, ils représentent, par contre, toute leur vie. Beaucoup de ces familles retourneront chez elles lorsque l’accalmie sera revenue, ne resteront sur place que celles qui ont tout perdu et qui n’ont plus où aller. En attendant, les conditions de vie sont difficiles. Chaque famille ayant une maison réserve une pièce pour celles qui arrivent. Quand il n’y a plus de place, les nouveaux venus sont installés dans des tentes. Mais ces tentes ne sont pas adaptées au climat rude de la région. L’hiver dernier, des centaines d’enfants sont morts de froid. Les classes, les bureaux et les mosquées ont été réquisitionnés l’été dernier lorsqu’il y a eu un gros flux de familles déplacées. Des abris en dur sont construits par une ONG française ACTED. Des tentes ont été offertes par des associations indiennes et iraniennes. Le plus grand problème est dans le manque de nourriture. Quatre bureaux de distribution de nourriture sont installés dans la vallée, mais les denrées sont insuffisantes. Le ministre chargé des réfugiés nous signale que le PAM n’a pu distribuer que deux fois 50 kg de céréales et une paire de baskets par famille en 11 mois. L’encaissement de cette région explique, selon les ONG rencontrées au Tadjikistan, les difficultés logistiques d’acheminement, depuis Douchanbé, de l’aide humanitaire dont manquent cruellement les milliers de familles de réfugiés qui ont fui les régions contrôlées par les Taliban. Si les dirigeants de la résistance reprochent aux ONG d’être peu présentes sur le terrain, les réfugiés et la population du Panshir ne cachent pas leur détresse, voire leur ressentiment à l’égard de la communauté internationale qu’ils accusent d’être indifférente à leur sort. La situation humanitaire dans cette région est d’autant plus critique que l’aide humanitaire acheminée par le Pakistan et Kaboul n’arrive pas à destination. On parle d’une sécheresse imminente dont les effets seraient désastreux sur une population fortement éprouvée par vingt ans de guerre. Dans les zones contrôlées par les Taliban, il semble que l’aide humanitaire est plus importante, car ne subissant pas les blocages rencontrés dans le Nord. Toute l’aide destinée à l’Afghanistan transitait par le Pakistan — l’acheminement y est plus facile — qui refusait de la faire passer, si ce n’est au compte-goutte. La résistance a demandé qu’elle soit dorénavant acheminée par le Tadjikistan pour ne pas être détournée. «Au nom de quoi et qui décide qu’une région doit avoir plus d’aide qu’une autre ? Pourquoi l’aide destinée au Nord n’arrive-t-elle pas ?», s’insurge Bahawdine Chanuni. Des ONG, telles que le PAM ou le CIR, pointent leurs difficultés d’acheminer par la route l’aide d’urgence depuis le Tadjikistan, et par voie aérienne les appareils tadjiks disponibles ne peuvent pas transporter plus de 2 à 3 tonnes de vivres, ce qui est faible. Le représentant du PAM au Tadjikistan affirme que l’an dernier, les besoins en farine pour la vallée du Panshir étaient évalués à 2 500 t. Cette quantité n’a pu être acheminée à cause des infrastructures et des conditions géographiques. Il ajoute que ce n’est pas le bureau du PAM de Douchanbé qui est concerné, mais ceux de Kaboul et d’Islamabad. La marge de manœuvre des ONG est étroite. L’aide d’urgence est tributaire des donateurs et de la volonté politique des Etats, laisse entendre le responsable de l’organisme humanitaire des Nations unies. Il ajoute que le gouvernement de Massoud devrait présenter un programme d’aide précis et détaillé qui sera soumis aux pays donateurs, lesquels feront une évaluation, mais il existe des stocks d’urgence qui peuvent être utilisés. A condition de régler le problème logistique. Et c’est le cercle vicieux, à moins que le PAM ouvre un bureau dans la vallée du Panshir et fasse appel à des locaux pour la distribution de vivres. «Ne nous oubliez pas ! Dites ce que vous avez vu. Portez nos voix que le monde n’entend pas.» C’est avec ce message insistant que nous sommes repartis.


Par Nadjia Bouzeghrane

Sommaire


L’éducation, malgré l’absence de moyens


Le ministre de l’Education, Mohamed Eliaz Zara, nous affirme que ce sont les mesures d’urgence qui priment aujourd’hui, alors que le système éducatif a été déstructuré par vingt ans de guerre.

Tout le budget de la résistance et du gouvernement Rabbani va au militaire, pour la défense. Même les salaires des enseignants (5 dollars) ne peuvent être payés. «L’éducation, c’est la base d’une nation, l’histoire d’un pays. Malheureusement, nous n’avons pas de moyens.» Il existe 700 écoles dans les six provinces du Nord, 200 000 élèves et 7000 enseignants, tous cycles confondus. «Notre souhait est de donner une priorité à l’éducation. Nous nous efforçons de scolariser le maximum d’enfants en pensant à l’avenir.» Mohamed Eliaz Zara déplore le peu d’aide internationale. « Depuis que je suis ministre de l’Education quelques mois-je n’ai pas eu d’aide. Sur les 17 écoles qu’elle prenait en charge, la Suède en suit 12.» Il nous parle d’un projet d’université d’une capacité d’accueil de 250 étudiants, dont 45 jeunes filles. Celle qui avait été précédemment construite a été détruite par les Taliban après avoir assuré un semestre de cours seulement. Pour la reconstruire, il faut 2 milliards d’afghanis, la monnaie locale. «J’ai obtenu un milliard du gouvernement Rabbani, il me reste à trouver le reste.» Le ministre nous signale, par ailleurs, avoir obtenu du gouvernement Rabbani 200 000 dollars pour l’impression de livres en Iran. «Je lance un appel à la communauté internationale pour nous aider dans l’éducation de nos enfants pour qu’ils ne soient pas tentés par le terrorisme et le trafic de drogue. Ce problème ne concerne pas que l’Afghanistan. Je souhaite par ailleurs que les Afghans de l’extérieur s’impliquent davantage dans le système éducatif.»

Par N. B.

Sommaire


Le «lion du Panshir», entre l’Orient et l’Occident

La rencontre dans la vallée du Panshir avec le commandant Massoud d’un groupe de cinq Afghanes vivant à l’étranger, de trois journalistes dont nous-mêmes et d’un écrivain — dans le cadre de Femmes en marche pour l’Afghanistan — a été un moment fort. Et ce, pour plusieurs raisons.

Le commandant Massoud, l’ancien homme fort de Kaboul, héros de la guerre contre les Soviétiques, symbolise aux yeux des Afghans la résistance au régime des Taliban et du Pakistan qui les soutient. Sa venue pendant notre séjour dans la vallée du Panshir a été annoncée à plusieurs reprises. L’offensive d’été lancée par les Taliban, appuyés par des troupes pakistanaises venait de commencer. Il s’est enfin présenté, le cinquième jour au matin, soit une heure avant le retour du groupe vers le Tadjikistan. Lors de l’entrevue qui a duré un peu plus d’une heure, le chef de la résistance afghane a exposé la situation militaire avant de répondre aux questions. le commandant Massoud nous a ensuite reçues en aparté. C’est la première fois qu’une journaliste algérienne représentant un journal algérien foule le sol afghan. Cela n’échappe pas à l’homme de guerre et néanmoins homme politique qui, profitant de cette opportunité, a délivré quelques messages à l’adresse de l’Algérie. Le commandant Massoud est présenté et se présente comme un homme d’ouverture, un musulman tolérant. Evoquant l’avenir de son pays, il a parlé d’élections, du suffrage universel, de démocratie, de droits de la femme au travail et à la participation à la vie politique. Dans le cadre de l’Islam et de la culture nationale. Ainsi, lorsqu’une Afghane du groupe venu de Douchanbé lui présente la charte des droits fondamentaux des femmes qui venait d’être adoptée dans la capitale tadjike, le commandant Massoud, après l’avoir lue, la signe, mais non sans y avoir apporté, par écrit, un amendement non moins fondamental : celui précisant que les droits des femmes afghanes doivent s’inscrire dans le cadre de la culture et des traditions afghanes. Et, cette fois à haute voix : «Les femmes peuvent travailler, participer aux élections, mais on ne peut pas transposer telle qu’elle une situation extérieure. On ne peut pas appliquer des lois conçues en Occident à l’Afghanistan, ce qui ne veut pas dire que nous sommes pour des lois médiévales. Il ne faut pas aller plus vite que le vent, bousculer les traditions culturelles, régionales et ethniques de l’Afghanistan.» Puis, s’adressant aux cinq Afghanes du groupe, le commandant Massoud a souligné qu’il espérait que c’était là le début du retour des Afghans de l’étranger pour voir les souffrances de leur peuple et participer à la reconstruction de leur pays. «Nos sœurs à l’étranger pourront aider celles restées au pays dans les domaines de la santé et de l’éducation. N’y a-t-il pas parmi elles des médecins, des enseignantes qui viendraient nous aider ?» Et «c’est bien d’écrire les droits des femmes, mais, chez nous, c’est l’action qui manque.» Le message est on ne peut plus clair. Dressant un rapide tableau de la situation politique et militaire, le commandant Massoud a précisé que «le Pakistan, depuis le gouvernement de Zia Ul Hak prépare l’occupation de l’Afghanistan pour avoir une position stratégique en Asie centrale. Le Pakistan a pensé prendre le pouvoir en Afghanistan après la défaite soviétique par l’intermédiaire de Gulbudin Hekmatyar. Cet échec n’a pas découragé les Pakistanais.» Il a ajouté que cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de problèmes internes. «Les Taliban sont soutenus par le Pakistan et, au niveau international, tant qu’il n’y a pas de pressions, la guerre continuera. Je persiste à dire que le problème de l’Afghanistan se résoudra au niveau international par une solution politique et au niveau interne par la démocratie, par des élections qui permettront au peuple de choisir son gouvernement. J’ai dit à Hekmatyar, qui prétendait avoir le soutien de l’armée et du peuple, d’aller vers la démocratie et des élections. Quand on se targue d’avoir le soutien populaire, on n’a pas à avoir peur des élections. Aux taliban qui affirment représenter les Pachtounes (une des ethnies du pays) et contrôler le pays j’ai dit que j’étais d’accord pour des élections.» Pour Massoud, la solution au conflit afghan ne peut pas être militaire. Interrogé sur le rôle qu’il jouerait dans un Afghanistan qui aura recouvré la paix, il a souligné : «Mon rôle est d’amener le peuple afghan vers la démocratie.» Massoud exclut toutefois toute coalition gouvernementale durable avec les taliban. «Nous sommes pour un gouvernement de transition de courte durée, de six mois à un an, jusqu’à l’organisation d’élections auxquelles prendront part tous les Afghans, de l’intérieur et de l’extérieur.» Les Taliban agissent comme une force d’occupation, a-t-il affirmé, ajoutant que le problème de l’Afghanistan est un problème d’ingérence étrangère. La veille de cette rencontre (le 1er juillet), la résistance afghane avait annoncé cinq attaques simultanées des Pakistanais et des taliban dans des provinces voisines de Kaboul. Une de ces attaques avait ciblé l’aéroport militaire de Bagram, mais, comme les autres, elle a échoué, a indiqué le commandant Massoud qui a souligné que «malgré l’opposition des Nations unies et de certains pays, le Pakistan a minutieusement préparé l’offensive d’hier soir avec 2500 hommes ,mais elle a échoué. Cela ne veut pas dire que c’est fini.» L’offensive s’est, en effet, poursuivie les jours suivants.


Par Nadjia bouzeghrane

Sommaire


Souhait d’un rapprochement avec l’Algérie

Dans l’entourage du commandant Massoud on n’a cessé de nous dire que ceux qui commettent des actes terroristes en Algérie ne sont pas des musulmans, des êtres humains, parce que l’islam «est une religion de concorde et d’amour».

Leur souhait d’un rapprochement, voire des contacts avec les autorités algériennes, est manifeste. Ainsi ,le porte-parole de l’ancien gouvernement Rabbani et de Massoud Mohamed Younès Kanoni, a regretté qu’il n’y ait plus de contacts avec l’Algérie. «Malheureusement, nous avons perdu les relations qu’on avait avec l’Algérie de par la situation intérieure du pays. Nous espérons pouvoir les rétablir.» Un compagnon de la première heure du commandant Massoud, le commandant Tadjedin, et qui n’est autre que son beau-père, a tenu à nous rencontrer pour nous dire que, certes, des Algériens ont participé à la guerre contre l’ex-armée soviétique, mais pas dans les rangs du commandant Massoud. Selon lui, ils étaient dans les rangs des troupes de Hekmatyar, tout comme aujourd’hui ils seraient du côté des Taliban et dans les troupes «arabes» de Oussama Ben Ladden qui finance un camp d’entraînement d’hommes en provenance de pays arabes pour agir ensuite sous d’autres cieux. «Les Algériens ont été formés par les Pakistanais. J’ai rencontré quatre de ces hommes dans un groupe de Gulbudin Hekmatyar à la frontière pakistanaise. J’ai demandé qui sont ces hommes. On m’a répondu que ce sont des frères venus se battre à nos côtés contre les soviétiques. En fait, ce sont des terroristes. Je tenais à vous dire cela. Il y en a encore beaucoup. Ils sont avec les Taliban et Ben Ladden.» Combien sont-ils ? Où sont-ils ? Les réponses restent évasives, alors que la condamnation du terrorisme est tranchée.

Par N. B.

Sommaire


«Ces Algériens qu’on appelle Afghans sont des terroristes»

Est-ce les conditions de l’entrevue ? Est-ce le manque de temps de notre interlocuteur, préoccupé par les combats qui se déroulaient à quelques kilomètres de là et dont il venait momentanément de quitter les lieux ? Les réponses du commandant Massoud à nos questions, en dehors de sa condamnation ferme du terrorisme, resteront lapidaires.

Des groupes armés tuent, en Algérie, des femmes et des enfants, des journalistes et des intellectuels au nom de l’islam. Certains membres de ces groupes sont appelés «Afghans» parce qu’ils ont participé à la guerre contre l’URSS et sont formés en Afghanistan et au Pakistan. Quel est votre commentaire ?
Je condamne les actes commis en Algérie par ces groupes armés. Je ne qualifie pas ces gens de musulmans. Ce sont des terroristes et leurs actes sont des actes de terrorisme. Ce sont des ennemis de leur propre peuple et de l’islam. Dans le djihad que nous avons mené contre l’URSS nous n’avons pas commis d’actes de terrorisme contre nos ennemis qui étaient, à cette époque, les communistes. Nous n’avons pas touché aux familles, aux enfants, aux femmes. Nous les avons respectés. Je condamne encore une fois ces gens qui se font appeler moudjahidine. Ils ne doivent pas se faire appeler Afghans. Ce sont des terroristes et des ennemis de la religion musulmane.
Que pensez-vous de l’interdiction du FIS ?
Je m’excuse encore une fois, si je ne m’attarde pas sur un sujet que je ne maîtrise pas. Nous avons condamné et nous condamnons ces terroristes qui tuent les femmes et les enfants.
Avez-vous des relations avec des forces politiques en Algérie ? Lesquelles ? Et avec le gouvernement algérien ?
Nous n’avons malheureusement aucune relation aujourd’hui avec le gouvernement algérien.
Souhaitez-vous en avoir ?
Oui. Absolument.
Quelle est votre appréciation de la situation en Algérie qui, après 10 ans de violence terroriste, s’achemine vers la concorde civile ?
L’Algérie est, géographiquement, éloignée de l’Afghanistan et je ne peux pas me prononcer sur une situation que je ne connais pas bien. Je ne peux pas m’avancer.


Par N. B.

Sommaire

 


Copyright © Women on the road for Afghanistan 2001